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Ys, la légende de la ville engloutie


A la grande marée de Mars appelée marée de Saint Guénolé, la mer de Douarnenez se retire loin , si loin qu'elle découvre les décombres d'une ville composée de palais en ruines, de murs effondrés et les vestiges des chaussées de pierre reliant l'Ile de Sein à la terre.


En ce temps là, le roi Gradlon Le Grand, roi de Cornouaille, fit construire pour sa fille Dahut, la merveilleuse cité d'Ys. Elevée plus bas que la mer, la ville d'Ys en était protégée par une puissante digue. Une écluse fermait le port et seul Gradlon pouvait décider de son ouverture ou fermeture, permettant ainsi aux habitants d'aller pêcher. Dahut profondément attachée aux Dieux Celtiques, accusait Corentin, évêque de Quimper, d'avoir rendue la ville triste et ennuyeuse. Elle rêvait d'une citée où seules régnerait richesse, liberté et joie de vivre. Aussi, Dahut donna-t-elle à chacun des habitants un dragon qui s'empara de tous les navires marchands.

Ainsi la ville d'Ys devint t-elle la plus riche et la plus puissante de Bretagne. Dahut y régnait en maîtresse absolue, gardienne de l'héritage des Celtes. Chaque soir, elle faisait venir un nouvel amant au palais, l'obligeant à porter un masque de soie. Mais le masque était enchanté, et à l'aube il se transformait en griffes de métal, tuant ainsi ses amants dont le corps était jeté du haut d'une falaise dans l'océan. Un beau matin, un prince de rouge vêtu, arriva dans la cité. Dahut tomba aussitôt amoureuse de l'étranger. Or, c'était le diable que Dieu envoyait pour chatier la ville pécheresse.

Par amour pour lui, elle lui donna la clé de l'écluse qu'elle déroba à son père pendant son sommeil. Le prince ouvrit l'écluse et l'océan en furie envahit la ville en déferlant dans les rues et étouffant ainsi les cris d'horreur des habitants. Seul le bon roi Gradlon réussit à s'échapper de cet enfer avec l'aide de Saint-Gwénolé. Sur son cheval marin, il se mit à chevaucher péniblement dans les vagues, alourdi par un poids qui n'était autre que sa fille. Sommé par Saint Guénolé, il abandonna sa fille et parvint à regagner le rivage. Aujourd'hui encore, il arrive que par temps calme, les pêcheurs de Douarnenez entendent souvent sonner les cloches, sous la mer et disent qu'un jour, Ys renaîtra plus belle, car elle n'est qu'engloutie.

On dit aussi que la ville d'Ys etait la plus belle capitale du monde et que Lutece fut baptisée Paris car "Par Ys" en breton signifie "pareille a Ys". Deux proverbes populaires bretons en temoignent:

Abaoue ma beuzet Ker Is
N'eus kavet den par da Baris

Depuis que fut noyée la ville d'Ys
on n'en a point trouvé d'égale a Paris


Pa vo beuzet Paris
Ec'h adsavo Ker Is

Quand Paris sera englouti
Resurgira la ville d'Ys

Derrière cette légende on retrouve l'opposition entre les vielles croyances et pratiques celtiques et la nouvelle religion chrétienne.

Le Texte


AR GÊR A IS

Petra 'zo nevez e Kêr Is ?
Ma 'z eo ken foll ar yaouankiz !
Ma klevan-me ar binioù,
Ar vombard hag an telennoù

Bodennoù drez 'zo diwanet
War dor an ilizoù prennet.
E Kêr Is n'eus nemet traoù kozh
Met an ebatoù-mañ 'vez bemnoz

D'o c'hwezek vloaz an holl verc'hed
N'o deus Doue 'met ar pec'hed
Ha da c'hober e gurunnen
E roont o c'haerañ rozenn

Ahes merc'h ar Roue Gralon
Tan an Ifern en he c'halon
Er penn kentañ deus an diroll
A gas d'he heul ar gêr da goll

Ha skuizh gant rebechoù he zad
Evit mont deus e zaoulagad,
He deus graet gant drouksperedoù
Ur palez kaer tost d'ar skluzioù

"Plijadur deoc'h er palez-mañ
Merc'hed jentil ha paotred skañv,
Plijadur deoc'h ha nozvezh gren
"Eme ar Priñs en ur antren

Ar Priñs a zouge dilhad ruz
E varv a oa hir ha du
E holl izili a virve
Hag e zaoulagad a zeve

Ha warne gant an holl en noazh
En ur ganañ : "mallozh d'ar groaz !
" Reas en seizh stumm disheñvel
Dañsoù ar seizh pec'hed marvel"

Ma dousig koant, merc'h da c'hGralon
Ha muiañ-karet va c'halon,
Ha n'hellfen ket en enep giz
Gwelout alc'houez skluzioù Kêr Is ?

"Piv a deu du-hont gant ar ru
Pignet war un inkane du ?
Hag eñ d'an daoulamm war e gein
Ken a strink an tan deus ar vein ?

"Gralon, Gralon, sav hepdale !
Sav evit heuliañ Gwenole,
Sav evit tec'hel deus ar mor,
Skluzioù Kêr Is a zo digor"


Bremañ aet eo Mari-Morgan
Ahes, diouzh sked al loar, a gan
A gan hag en ur vousc'hoarzhin
A grib er mor he blev bezhin.
La Ville d'Is

Qu'y a-t'il de neuf à la ville d'Is ?
Qu'elle est folle la jeunesse !
J'entends le biniou,
La bombarde et les harpes.
Des buissons de ronce ont germé
Sur les portes des églises fermées à clé.
À la ville d'Is
il n'y a que des vieilles choses
Mais des parties de plaisir tous les soirs.
De leurs seize ans toutes les filles
N'ont de Dieu que le pêché
Et pour faire sa couronne
Elles donnent leurs plus belles roses.
Ahes, la fille du roi Gradlon
Le feu de l'enfer dans son coeur.
Au commencement du déchainement
A envoyé à sa suite la ville à sa perte.
Et fatiguée des reproches de son père
Pour s'éloigner de ses yeux,
Elle a bâtit avec mauvais esprit
Un beau palais près des écluses.
"Plaisir à vous dans ce palais
Gentilles filles et garçons légers,
Plaisir à vous et nuitées tremblantes."
Dit le prince en y entrant.
Le prince portait des vêtements rouges
Sa barbe était longue et noire
Tous ses membres bouillaient
Et ses yeux brûlaient.
Et nu par dessus les autres
En chantant "malheur à la croix !"
Fit de six façon différentes
Les danses des six pêchés mortels.
"Ma douce amie, fille de Gradlon
Et la mieux aimée de mon coeur,
Ne pourrrais-je pas contre la tradition
Voir la clé des écluses de la ville d'Is ?"
Qui va là-bas dans la rue
Monté sur un étalon noir ?
Et d'aller ainsi au galop, tant dans son dos
Jaillit le feu de la pierre
"Gradlon, Gradlon lève-toi sans tarder !
Lève-toi pour suivre Gwenole,
Lève-toi pour échapper à la mer,
Les écluses de la ville d'Is sont ouvertes."
Maintenant, devenue sirène
Ahes, au clair de la lune chante.
Chante et en souriant
Peigne dans la mer ses cheveux d'algues.